Chez Luc (brèves de comptoir)

"Chez Luc", le bar où l'on peut venir bavarder ensemble à propos des choses qui fâchent, ou qui réjouissent, ou qui émeuvent ... Je vis près d'Avignon, en Provence. J'ai trois bons copains qui viennent au bar pour nous raconter la dernière du jour : Jack, de Belinto en Provence, Patrick, d'Audierne en Bretagne, et Philippe, de Piriac en Bretagne du sud (qu'on appelle aussi "Pays de Loire").

Les auteurs (le patron et les habitués)

Photo Luc

Luc, Avignon

Photo Padraig

Padraig, Audierne

Photo Jack

Jack, Belinto

Photo Philippe

Philippe, Piriac

lundi 21 février 2011

Le point sur les révoltes dans les pays arabes



Depuis le mois de décembre, ça bouge beaucoup dans les pays arabes. J'ai pensé qu'il était temps de faire un petit point sur la question, pour tenter d'y voir un peu plus clair.

On peut déjà dire deux choses :
- Tout est parti de l'immolation par le feu de Mohamed Bouazizi, 26 ans, le 17 décembre 2010 à Sidi Bouzid, en Tunisie.
- Ces révoltes sont portées par une population très jeune. La carte ci-dessus, parue cette semaine dans TIME, montre le pourcentage de population de moins de 30 ans pour chaque pays. En Tunisie, il est de 52%, et en Egypte de 61% !

Voyons à présent la liste des pays concernés, classés par ordre chronologique :

17 décembre 2010 : la Tunisie

Les manifestations se déclenchent le 17 décembre 2010 et se propagent rapidement à tout le pays, jusqu'à la fuite de Ben Ali vers l'Arabie Saoudite le 14 janvier 2011. Un premier gouvernement provisoire a été formé, puis a été rejeté par le peuple, et un deuxième gouvernement a été formé le 27 janvier. La situation n'est toujours pas stabilisée, mais l'armée s'est mise très tôt du côté du peuple.

Lire : Révolution de jasmin (Wikipédia)

5 janvier 2011 : l'Algérie

Après des manifestations contre la vie chère les 3 et 4 janvier, des émeutes se déclenchent le 5 janvier au soir à Bab el Oued, suite à l'expulsion d'un groupe de vendeurs ambulants. Ensuite, d'autres manifestations ont eu lieu, mais la répression policière a été très forte. Suite à ces événements, le président Bouteflika a annoncé le 3 février la levée de l'état d'urgence, en vigueur en Algérie depuis 1992.

Lire : Protestations algériennes de 2011 (Wikipédia)

14 janvier 2011 : la Jordanie

Une vague de manifestations populaires sans précédent a débutée à partir du 7 janvier 2011 en Jordanie. Le roi Abdallah II essaye de désamorcer la situation très vite en remplaçant le premier ministre, forme un nouveau gouvernement le 9 février. Cependant, les manifestations continuent.

Lire : Protestations jordaniennes de 2011 (Wikipédia)

22 janvier 2011 : le Yemen

Des hommes s'immolent par le feu, suivant l'exemple du jeune tunisien. Puis, le 27 janvier, près de 16 000 personnes manifestent dans les rues de Sana'a, réclamant le départ du président de la république Ali Abdullah Saleh, au pouvoir depuis plus de trente ans, et qu'on soupçonne de vouloir remettre le pouvoir à son fils Ahmed, chef de la garde républicaine. Les manifestations continuent, encouragées par la chute du pouvoir égyptien.

Lire : Protestations yéménites de 2011 (Wikipédia)

25 janvier 2011 : l'Egypte

Le 25 janvier 2011, après plusieurs cas d’immolation par le feu, divers mouvements appellent à manifester via Facebook, pour une journée de revendications politique baptisée « journée de la colère ». Ce jour là, 10 000 manifestants se regroupent sur la place Tahir au Caire. Deux jours plus tard, le 27 janvier, Hosni Moubarak coupera Internet, et le 30 janvier, il supprimera l'accréditation de la chaîne arabe Al Jazeera. Cela ne fera qu'accroître la mobilisation du peuple, et l'armée se rangera de leur côté. La pression de la population place Tahir va aller croissant. Le 10 février, des rumeurs prédisent le départ de Moubarak. Le soir, il fait une intervention télévisée où il dit qu'il ne s'en va pas. Ce n'est que le 11 février que le président Moubarak et sa famille ont quitté le pouvoir pour sa résidence de Charm el-Cheik. Le vice-président Omar Souleiman annonce officiellement que le Président égyptien renonce à l'exercice de ses fonctions et que le pouvoir est transféré à l'armée en attendant des élections libres. Depuis, un calme relatif est revenu, et les touristes reviennent contempler le Nil et les pyramides.

Lire : Révolution égyptienne de 2011 (Wikipédia)

30 janvier 2011 : le Soudan

Le 30 janvier 2011, des manifestations ont eu lieu à Khartoum. Et le 21 février, le président Bashir a annoncé qu'il ne se représenterait pas en 2015.

Lire : Protests in Sudan (Wikipedia)

3 février 2011 : l'Irak

En février, des manifestations ont eu lieu, et une grande manifestation dans tout le pays est prévue pour le 25 février.

Lire : Iraki protests (Wikipedia)

13 février 2011 : Bahrein

A partir du 13 février, des manifestations ont eu lieu Place de la Perle à Manama, la capitale. Mais on a assisté à une répression policière particulièrement violente, avec des tirs à balles réelles sur la foule, y compris depuis des hélicoptères. Puis, le 19 février, le gouvernement a donné ordre aux forces de l'ordre de se retirer. Les milliers de manifestants ont pu alors retourner s'installer sur la Place de la Perle. Le 20 février, on a amené de la nourriture et de l'électricité aux manifestants.

Lire : 2011 Bahraini protests (Wikipedia)

14 février 2011 : L'Iran

Les manifestations en Iran ont débuté le 14 février (lundi dernier). Elles font l'objet d'une sévère répression, et on a peu d'informations sur ce qui se passe réellement là bas. Mais elles ont l'air de continuer.

Lire : 2011 Iranian protests (Wikipedia)

15 février 2011 : La Libye

C'est la plus récente et une des plus brutales. Elle a débuté le 15 février avec une manifestation à Benghazi suite à l'arrestation du militant des droits de l'homme Fehti Tarbel. Et puis la tension est montée pour arriver au 17 février, le "jour de la colère". Et là, la répression a été très violente. Il y a eu des dizaines de morts parmi les manifestants. Les affrontements sont de plus en plus violents, et il est possible que ce pays soit en train de basculer dans la guerre civile.

Lire : 2011 Libyan protests (Wikipedia)

La chute de Ben Ali et d'Hosni Moubarak ont montré l'exemple. Les peuples arabes se soulèvent les uns après les autres, et les régimes essayent de se maintenir au pouvoir plus ou moins maladroitement.

Mais, ce qui caractérise tous ces pays, c'est la corruption de leurs dirigeants (la fortune personnelle de Moubarak est égale à l'endettement de l'Egypte ...), et la jeunesse de leur peuple. Que va-t-il se passer ? Tout peut arriver. Le meilleur comme le pire.

Pour en savoir plus :
1. 2010–2011 Middle East and North Africa protests (Wikipedia)
2. Protestations dans les pays arabes de 2010-2011 (Wikipédia)

Crédit illustration : TIME

15 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Tous ces pays en révolte se disaient peu ou prou de tendance socialiste. Curieux que sur ces évènements, nos chers socialistes, d'habitude si prompts à la remarque acerbe soient totalement silencieux...Je pense notamment à Marie Ségolène qui doit nous préparer un coup d'éclat dont elle a le secret!

mardi, 22 février, 2011  
Blogger Padraig said...

Socialistes ? Là, c'est tirer le bouchon un peu loin. Il existe une "internationale socialiste", aucun des gouvernements de ces pays n'y était représenté...

Ceci étant, le B.A. BA de tout bon dictateur est "d'oeuvrer exclusivement et avec abnégation pour le peuple". Hitler n'était il pas un "national socialiste" ? Ou Staline "le petit père du peuple" ? A ce titre, ils se parent tous d'une fibre sociale soigneusement développée par leur propagande !

Non, même la belle Ségolène n'a pas de rapport avec ces dictateurs... En revanche, certains à droite (voir photo infra)...

mardi, 22 février, 2011  
Blogger Luc said...

@ Yvonnig : Exact. L'Iran n'est pas un pays faisant partie de la Ligue Arabe.

mardi, 22 février, 2011  
Blogger Luc said...

@ Yvonnig : Concernant la Mauritanie, le 17 février, un manifestant, Yacoub Ould Dahoud, s'est immolé par le feu près du palais présidentiel de Mohamed Ould Abdel Aziz.

mardi, 22 février, 2011  
Blogger Padraig said...

Je pense qu'Yvonnig voulait dire que la majeure partie de la population d'Iran n'est pas Arabe, mais que ce sont essentiellement des Persans, des Kurdes, des Gilakis, des Mazandaranis, des Lors et des Baloutches. Viennent ensuite des Azéris, des Turkmènes,des Qashqai, ainsi que des arabes du Khuzestan, des Arméniens et des Assyriens.

Donc, pas beaucoup d'Arabes, sauf à traiter d'Arabe tout ce qui n'a pas la peau claire ! Mais laissons cela à Brice ;-)

mardi, 22 février, 2011  
Blogger Jack said...

Pour revenir sur l'Iran ou la Perse, ce n'est pas un pays arabe car sa langue officielle est le persan tout simplement. Par contre c'est une "république islamique" (même si ces 2 mots accolés me rendent perplexe).
Et comme dans nos esprits attardés on a tendance à poser l'équation arabe = musulman, oubliant au passage qu'il existe des arabes non musulmans : on fait souvent l'amalgame.

mardi, 22 février, 2011  
Blogger Jack said...

@Luc : "le meilleur comme le pire" je parie hélàs pour le pire et suis particulièrement atterré d'entendre les commentaires béats de nombreux journalistes. Comme s'il suffisait de chasser les despotes pour faire face et résoudre spontanément les nombreux problèmes que doivent affronter ces pays après des décennies d'incurie. Il est clair que sans l'aide internationale, ce sera très difficiles pour eux. Ors les grands pays sont bien trop empêtres dans leurs propres problèmes.
J'entendais ce matin Raffarin de retour d'Algérie, préconiser de forts investissements des grandes entreprises nationales en Algérie.
Comme si les entreprises investissait dans les pays à risques et oubliant au passage que nous même avons perdus énormément d'emplois industriels et de que nombreuses sont les régions en déficit chronique d'emploi dans notre propre pays.

mardi, 22 février, 2011  
Blogger Luc said...

Le point à ce jour (mercredi 22 février) : La situation dans le monde arabo-musulman pays par pays (Challenges)

mercredi, 23 février, 2011  
Blogger Luc said...

Carte de la situation en Libye

mercredi, 23 février, 2011  
Blogger Jack said...

Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

jeudi, 24 février, 2011  
Anonymous Cédric said...

L'année 2011 pourrait bien être une année plus importante que l'année 2001 en terme de redéfinition du nouvel ordre mondial.

jeudi, 24 février, 2011  
Anonymous Anonyme said...

Je me demande si les informations que nous recevons ne vont pas nous faire le coup de l'effondrement du bloc de l'est avec des images truquées (cf. l'exécution de Ceaucescu) et pour lesquelles nous avons été magnifiquement bernés!
Je me souviens avoir été présent (professionnellement) au Yémen lors du renversement du président. A l'époque, je me trouvais à l'aéroport de Sanaa, et des journalistes de TF1 étaient présents dans l'aérogare sans autorisation de sortie dans le pays. Ils ont fait leur reportage uniquement sur des témoignages de voyageurs présents, dont le mien, avec toutes les inexactitudes que cela pouvait comporter!
Merci en tout cas de la disparité des sources d'information, où je peux me faire un peu une idée de tout ça.
Cordialement
JDx

lundi, 28 février, 2011  
Blogger Padraig said...

C'est vraiment bien, ce tour d'horizon de la libération du Maghreb. Passionnant, on s'y retrouve un peu mieux.

Euh, Luc, quand tu auras un instant, peut-être pourrais-tu nous faire la même chose concernant les valses du gouvernement. C'est un peu dur à suivre... Un jour, MAM est assuré du soutien total du Président, le lendemain elle est limogée sans le moindre mot à son sujet... On voit réapparaître un repris de justice au Quai d'Orsay (à la Justice, c'aurait été un peu limite, évidemment). Brice va à euh, au fait, où va-t-il donc ? Et l'éminence grise va à l'intérieur ? Et Fillon, il est toujours premier ministre, ou quoi ?

Non, vraiment, tout ça donne le tournis. Ca donne une impression de grand désordre... Luc, explique-nous tout ça avec des mots simples, SVP...

lundi, 28 février, 2011  
Blogger Jack said...

Il manquait la Syrie dans ta liste Luc, avec 65% de moins de 30 ans.
Il y a peu le dictateur local, successeur de son papa... se gaussait de ne pas être concerné parce qu'il conduisait une politique extérieure au diapason de l'opinion arabe (comprendre une politique anti-américaine).
Comme tous les dictateurs il n'est sans doute entouré que de flatteurs et donc coupé des réalités.
Mais comment faut-il interpréter cette révolte généralisée et quasi simultanées dans le monde arabe, pure contagion médiatique, j'en doute.
Il y a surement d'autres facteurs communs que le nombre de jeunes de moins de 30 ans et la corruption du pouvoir à rechercher...la simultanéité de ces révoltes me laisse dubitatif.

jeudi, 24 mars, 2011  
Blogger Padraig said...

Intéressante remarque de Jack... Moi, je pense que c'est spontané, tout ça. On parle d'Internet et de Facebook, mais la télévision suffit à montrer à tous ces peuples comment les choses se passent ailleurs. Alors ils en veulent aussi... Difficile de les blâmer...

jeudi, 24 mars, 2011  

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