Chez Luc (brèves de comptoir)

"Chez Luc", le bar où l'on peut venir bavarder ensemble à propos des choses qui fâchent, ou qui réjouissent, ou qui émeuvent ... Je vis près d'Avignon, en Provence. J'ai trois bons copains qui viennent au bar pour nous raconter la dernière du jour : Jack, de Belinto en Provence, Patrick, d'Audierne en Bretagne, et Philippe, de Piriac en Bretagne du sud (qu'on appelle aussi "Pays de Loire").

Les auteurs (le patron et les habitués)

Photo Luc

Luc, Avignon

Photo Padraig

Padraig, Audierne

Photo Jack

Jack, Belinto

Photo Philippe

Philippe, Piriac

dimanche 2 avril 2006

L'exception française



Lors de ma lecture quotidienne de mes blogs préférés, je tombe sur la note suivante de Vincent : CPE = précarité ??? Arf !!!!, tirée elle-même d'une notre passionnante de Maitre Eolas : Remettons en une couche avec le CPE.

Mes biens chers frères, mes bien chères soeurs, je ne résiste pas au plaisir de vous reproduire ci-dessous un extrait du mot de Maître Eolas, à lire avec lenteur et délectation ...

"Imaginons une entreprise qui embauche trois jeunes de moins de 26 ans : Alain, Bernard et Charles. Elle les embauche le même jour et les paye au SMIC soit 1350 euros brut pour arrondir (1357,07 exactement pour 169 heures mensuelles).

Alain est embauché en CPE, Bernard en CDI, Charles en CPE (en effet, la loi ne substitue pas le CPE au CDI, elle crée cette possibilité, l'employeur peut choisir, le salarié exprimer une préférence).

Alain est licencié le 23e mois, Bernard pour cause réelle et sérieuse le 21e mois, Charles le 25e mois.

Alain a un mois de préavis, qu'il effectue. Il touchera l'indemnité de rupture de 8% soit 2592 euros (8% de 1350 euros brut X 24 mois travaillés).

Bernard, en CDI, a deux mois de préavis qu'il effectue et quittera son emploi le 23e mois, le même jour qu'Alain : il touchera zéro euro d'indemnité. En effet, l'indemnité légale de licenciement n'est dû qu'après deux ans d'ancienneté, seuil non atteint ici. A ancienneté égale, on passe de 2592 euros à zéro.

Charles est quant à lui en CDI de droit commun, la période de consolidation étant terminée. Il effectue deux mois de préavis, et touche l'indemnité légale de licenciement. Soit 270 euros, en supposant qu'il a pris tous ses congés payés : un dixième de mois par année d'ancienneté soit 20% de 1350 euros.

Moralité : Employeurs, vous voulez licencier des jeunes ? Prenez les en CDI, ça coûte moins cher. Etudiants, vous voulez être protégés ? Demandez que le CPE dure dix ans !

C'est amusant, le droit, hein ?"


Les étudiants, qui sont censés étudier, n'ont évidemment pas lu le texte. Le CPE les protège vraiment, mieux que le CDI. Et ils foutent la pagaille pour rien, juste pour le plaisir de foutre la merde ...

En anglais, "whine", ça veut dire gémir, se plaindre ... On est la risée de tous les autres pays du monde. On se forge une solide réputation de branleurs professionnels, alors qu'en fait, on travaille très bien et très efficacement chez nous.

C'est ce qu'on appelle "l'exception Française" ...

Pour en savoir plus :
1. CPE = précarité ??? Arf !!!! (Chez moi, à l'Intérieur...)
2. Remettons en une couche avec le CPE (Journal d'un avocat)

Crédit dessin : Copley News Service

8 Comments:

Blogger La griotte said...

Déçue...

C'est bien connu, les étudiants préfèrent "foutre la merde" que d'aller en cours... En fait, à lire ton billet on est des millions d'abrutis qui n'avons rien compris à ce privilège que nous offre le gouvernement. Comme si on n'en avait pas assez d'essuyer le mépris des dirigeants et des entreprises, il faut que certains concitoyens en rajoutent une couche !

Autre perspective à ta petite histoire : Abdel est embauché en CDI en même temps que Lucie est embauchée en CPE. Au bout de 23 mois, Abdel n'a commis aucune faute réelle et sérieuse et peut donc garder son emploi, continuer à payer son loyer, le crédit pour sa voiture, la crèche pour ses enfants... Lucie n'a commis aucune faute réelle et sérieuse non plus mais l'entreprise veut garder ses options de flexibilité et met donc Lucie à la porte. Les indemnités de licenciement pourraient lui servir à payer ses crédits le temps de retrouver un travail (c'est si simple de nos jours !!) mais avec son contrat instable, on n'a pas voulu lui en accorder.

La pagaille du pays que tu déplores reflète tout simplement un ras-le-bol qui ne se limite pas au CPE. La crise est plus profonde. Et quand le gouvernement, censé nous représenter, ne nous écoute pas, on est obligé de gueuler plus fort... et plus nombreux.

Enfin, un petit coup d'oeil au Courrier International de la semaine dernière et tu verrais que nous ne sommes pas la risée de tous les autres pays du monde. Grecs, Portugais, Allemands, Belges... nombreux sont les journalistes qui comprennent très bien le mouvement.

dimanche, 02 avril, 2006  
Blogger Luc said...

Ah, la griotte, désolée de t'avoir déçue ...

Bon, je pense comme toi que ce mouvement anti CPE n'est qu'un prétexte, et qu'il exprime en fait un malaise bien plus profond, qui n'a rien à voir avec le CPE.

Je pense que, pour la première fois, les jeunes d'aujourd'hui pensent qu'ils vivront moins bien que la génération précédente. Que ça sera plus dur pour eux. C'est la génération "no future".

Il y aurait beaucoup à dire là dessus. Peut-être en parlerai-je.

Mais pour le CPE, ils ont tout faux. Ils ont une méconnaissance abyssale du monde de l'entreprise. Evidemment que chez les patrons il y a des salauds. Mais la très grande majorité d'entre eux ne sont pas comme ça. Une entreprise qui marche, c'est quoi ? C'est des employés formés, bien dans leur boulot, compétents, motivés, efficaces. Si tu formes un jeune et que tu investis en lui pour le former et lui donner une véritable compétence professionnelle. Si, une fois que tu y es arrivé, tu le vires pour recommencer avec un autre, c'est que tu es un parfait abruti !!! Tu vois, il suffit de se mettre une seconde dans la peau d'un patron pour comprendre qu'un employé qui fait l'affaire, on n'a qu'une idée : le garder !!!

La vraie question que va se poser un patron c'est : vais-je risquer d'embaucher un jeune sans expérience ? Si je peux arrêter l'expérience quand je veux, alors, OK, je prends le risque. (et évidemment, si ça marche, c'est tout bon : je le garde). Voilà, c'est aussi simple que ça.

Mais tu as raison : la crise est beaucoup plus profonde. C'est assez inquiétant, quand on y pense. La jeunesse, ça doit porter l'espoir, l'avenir, les projets, le futur ...

Enfin, ça devrait.

dimanche, 02 avril, 2006  
Blogger Jack said...

Je vais vous parlez de mon entreprise, non concernée par le CPE, car ce n’est pas une PME.
Bien dans mon entreprise, et plus généralement dans l’ensemble des entreprises européennes de mon groupe, les embauches sont totalement verrouillées : IL EST INTERDIT D’EMBAUCHER. (pas plus en CDI qu’en CDE)
Et cela n’a rien à voir avec le niveau des commandes, le recours à l’intérim est la seule issue : comme chacun sait l’intérim est plus cher (la boite d’intérim prend sa marge), mais ce n’est pas important, aujourd’hui ce qui est bien c’est le précaire, le provisoire, si vous préférez.
Dans certaines entreprises on ne croit pas non plus au futur de l’industrie européenne.
Çà fait un point commun avec les jeunes, qui ont du mal à croire au futur.
Un autre détail croustillant : on fait des produits plutôt performants du genre qui durent très très longtemps.
Bien vous savez ce que nous disent certains de nos clients (heureusement pas tous) vous n’auriez pas un truc moins cher qui durent pas longtemps, parce que moi mon cher monsieur, dans 5 ans je ne sais pas si j’aurai encore des clients : voilà tout est dit.

L’avenir c’est peut-être d’acheter une iourte et de suivre son troupeau... mais il faut quand même croire qu’il y aura de l’herbe ailleurs !

dimanche, 02 avril, 2006  
Blogger Luc said...

@ La griotte : Concernant le logement de Lucie et les emprunts qu'elle n'a pas pu obtenir à la banque, je te rassure. Lucie n'a eu aucun problème pour signer son bail et n'a eu aucun problème pour emprunter à la banque. Tu sais pourquoi ? Parce que, dans les deux cas, les parents de Lucie se sont portés caution solidaire, tout simplement. C'est ce que font tous les parents du monde. C'est ce qu'on fait mes parents quand j'ai démarré dans la vie, et c'est ce que j'ai fait pour mes enfants quand ils ont démarré dans la vie.

Ces histoires de "précarité" dûe au CPE, c'est un truc bidon de plus sur lequel les étudiants se sont fait bourrer le mou par les syndicats ...

lundi, 03 avril, 2006  
Blogger Vicnent said...

@griotte : "l'entreprise veut garder ses options de flexibilité et met donc Lucie à la porte." : ha ha ha !!! :

1/ Méconnaissance complète du monde de l'entreprise.

3/ Mais c'est vrai qu'il vaudrait mieux embaucher tout le monde, toujours en CDI. et puis, ne même pas les virer quand ça va moins bien, user la boite jusqu'à la corde, et puis finalement devoir virer tout le monde : solidarité !

4/ sais tu par exemple aussi que quand une société fait de gros bénéfices, elle peut aussi aller "très mal ?"

5/ et pourquoi vous ne vous battez pas pour qu'on réduise le nombre de fonctionnaire qui nous coute chers (regardez les stats : savez vous qu'en europe, tous ont BCP moins de fonctionnaires (12, 15 ou 17% au lieu de plus de 20 pour nous, et au japon, c'est 8% seulement !!!), et pourquoi vous ne vous battez pas contre les autres contrats : les CDD, les intérims etc...)

pffff, ha, ces jeunes....

M'enfin, sur le reste, je suis assez d'accord : y'a un état d'esprit super pessimiste en France en ce moment que je ne comprends pas...

lundi, 03 avril, 2006  
Blogger Betty said...

Absolument ! Allez petit témoignage perso (représentatif de ce que je vois des autres entreprises). Dans ma boite de moins de 10 salariés, ambiance familiale assurée ! on a embauché puis viré 4 jeunes (dont 1 moins jeune !) en moins de 5 ans ! (tous en CDI !!!) pourquoi ? pas rentable !! cout de la main d'oeuvre trop élevé, rentabilité moyenne, parcontre grosse source de frais et de conflits ! chaque fois même motif : non adapté au poste. On a tout essayé, le jeune en contrat de qualif, le jeune diplomé, l'ex jeune avec petite expérience le vieux en retour à l'emploi etc... rien à faire ça ne marche pas. Résultat le patron préfère refuser du boulot !.... Effectivement embaucher puis former du personnel ça coûte, c'est un investissement et donc un risque, ça demande du temps de l'énergie. Alors CPE ou CNE, il n'est pas prêt de s'y recoller le patron... et moi qui suis chargée des chiffres je suis bien obligée de constater qu'il a raison, non seulement il gagne plus de fric mais en plus il est peinard ! ça me désespère !

lundi, 03 avril, 2006  
Blogger Vicnent said...

@Griotte :
tu trouverais normal d'embaucher un jeune non rentable ? non, je ne crois pas. Alors, pourquoi trouver légitime de le garder ?

D'autre part, mets à la place d'un banquier ou d'un actionnaire : tu trouverais normal de prêter ton argent en pure perte ?

une société de droit privé à vocation à être rentable, ne serait ce que pour assurer sa (sur)vie...

mardi, 04 avril, 2006  
Blogger Jack said...

A propos du CPE et de son prédécesseur, j’entends un argument qui revient souvent dans la bouche de ceux qui défendent l’emploi provisoire et surtout le droit de licencier sans contrainte.
Je l’ai encore entendu ce soir sur Europe 1 :
Vous comprenez lorsqu’on embauche on sait que s’il faut licencier, çà va être la croix et la bannière pour réduire la voilure si les commandes baissent, 4 licenciements sur 10 finissent au Prud’homme et dans 9 cas sur 10 le patron perd le procès.
Et je me dis si c’est vraiment çà le problème, voyons donc ce qui se passe avec les Prud’hommes, réformons donc cette vénérable institution, si elle ne rend pas correctement la « justice ». Bizarrement personne ne le propose.

On considère donc que son fonctionnement est acceptable (les juges sont composés de patrons et de salariés et aux dires de tous ils se mettent souvent d’accord sans trop de difficultés).

Alors, où est la vérité ?

Si 9 fois sur 10 le patron est perdant c’est peut être parce qu’il est le plus fort le plus instruit et peut se permettre tout ce qu’il veut, y compris défier le code du travail et que l’on peut imaginer que d’autres licenciements mériteraient de passer en jugement, parmi les 6 /10 qui n’y ont point recours.

A moins que les juges soient tous communistes ?

Allez, je m’en vais vous narrer une petite histoire vraie :
C’est dans une PME qui va bien et embauche à tour de bras de jeunes ingénieurs, elle va même jusqu’à en débaucher.
Un de ceux-ci (débauché) un matin à 9 h 00 demande au chef du personnel des précisions sur la convention collective régissant l’activité.
Il était en période d’essai, à 11 h 00 il était de nouveau libre de ses mouvements... viré !
Inutile d’aller au Prud’homme, durant la période d’essai c’est comme on veut quant on veut...

mardi, 18 avril, 2006  

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